Aurore de l'Europe

Un blog destiné à informer et à entretenir le débat autour des questions de droits de l'homme et de bioéthique.

Friday, November 04, 2005

Le combat de Mara (1): un choc septique me précipite au coeur de la bioéthique

Ce blog prend un tour beaucoup plus personnel, pour une fois. En effet, ma mère est hospitalisée depuis le 12 octobre avec un choc septique, une grave réponse inflammatoire à une infection. Ce choc septique était apparu à la suit de la perforation d'un ulcère qui devait être opéré en urgence.

Ce choc septique avait favorablement évolué dans un premier temps, ma mère ayant deux jours de crise, puis se reprenant. Et ensuite, une semaine après, une nouvelle perforation avait lieu, causant à nouveau un choc septique. Après avoir très mal évolué jusqu'au 28 octobre, la situation s'est apparemment stabilisée depuis.

Mais - et c'est sans doute une des conséquences de la loi sur l'euthanasie en Belgique - dès le 27 octobre, l'équipe soignante commençait déjà à piaffer pour suspendre les soins.

Je me suis vu ainsi interroger par une infirmière à la sensibilité de buldozer (et qui se prétendait catholique de surcroît), sur ce que je souhaitais pour ma mère. La suite du discours, j'aurais pu l'écrire moi-même, tellement je l'avais entendu dans mes cours de bioéthique à l'UCL: "Je ne sais pas si vous vous rendez compte du fait que la situation de votre mère est grave". J'ai répondu affirmativement. J'ai aussi ajouté que tout devait être fait, tant qu'il y avait encore un espoir. "Qu'est-ce que vous entendez par ça?" me demande alors l'infirmière. "Tant que ses fonctions vitales se maintiennent" ai-je répondu.

Pour mieux comprendre la réaction de l'équipe soignante, il faut savoir que des biopsies (prélèvement de tissus) réalisés lors de la première opération de ma mère, avaient mis en évidence un cancer de l'estomac - au degré d'évolution inconnu, pour l'instant. Dès lors, comme me l'expliquera plus tard un infirmier, si l'équipe soignante est livrée à elle-même, elle commence à effectuer une analyse de "la qualité de la vie" - bref, dans le cas de ma mère, elle était condamnée à une interruption de soins par défaut.

Pour revenir à ma discussion avec l'infirmière, elle m'a alors demandé: "Donc, même si votre mère doit mourir d'un cancer, dans des douleurs atroces, on doit la sauver?" J'ai répondu affirmativement, même si in petto, je me demandais comment réagirait des personnes non préparées au plan éthique... Il existe des traitements pour la douleur dans le cancer, et ils sont efficaces. Si une personne souffre, c'est essentiellement un manque de formation des médecins. En revanche, une présentation aussi biaisée aboutit immanquablement à précipiter une issue vers laquelle on veut forcer la famille du patient - l'interruption de soins dans ce cas.

L'infirmière est encore revenue à la charge: "Donc, même si elle fait une trentaine d'arrêts cardiaques, on doit la réanimer, au besoin en massant le coeur?" J'ai encore répondu affirmativement. Elle m'a alors répondu en me disant: "Oui, on savait comment vous pensiez, mais je devais vous poser la question, vous savez on change parfois d'avis..." Je ne doute pas que certaines familles peuvent changer d'avis quand elles sont confrontées à ce genre de présentations brutales! Il n'est pas inutile de préciser que dans un hôpital de la Région bruxelloise, une infirmière avait assassiné un patient kosovar dans un coma éthylique au motif que "déjà nous n'avons pas assez d'argent pour soigner les belges, alors les étrangers...." Cette infimière n'a jamais été poursuivie au pénal, grâce à la protection que lui assuraient les médecins et le "comité d'éthique" de l'hôpital en question...

Le lendemain de cette entrevue, j'ai pris un rendez-vous avec un des médecins de l'hôpital pour bien confirmer que tout devait être tenté pour sauver ma mère, jusque et y compris ce que certains appellent (à tort selon moi), l'acharnement thérapeutique.

Mais nous voici, donc, dans un pays où les parents donnent la vie aux enfants et où les enfants devraient donner la mort aux parents!

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