Aurore de l'Europe

Un blog destiné à informer et à entretenir le débat autour des questions de droits de l'homme et de bioéthique.

Thursday, May 26, 2005

Jurisprudence Perruche: le retour?

Dans le journal Le Figaro d'aujourd'hui, on pouvait découvrir qu'une famille dont la fille est née avec une malformation congénitale des membres inférieurs (dont on s'accordera pour noter qu'il est beaucoup moins grave que le cas Perruche qui était irrémédiablement handicapé tant moteur que cérébral) désirait réveiller la jurisprudence "Perruche" en soulevant la rétroactivité de la loi votée par le Parlement français en 2001.

Pour ceux qui ne se souviendraient pas du dossier, il s'agissait d'un enfant dont la mère avait été contaminée par la rubéole pendant sa grossesse, et qui par suite d'une mauvaise lecture des résultats, n'avait pas pu avorter.

Or, la Cour de cassation avait reconnu dans le chef de l'enfant, Nicolas Perruche, (vous pouvez lire l'arrêt intégral ici: http://agora.qc.ca/reftext.nsf/Documents/Handicape--Larret_Perruche_-_documents_de_la_Cour_de_cassation_17_) un préjudice du fait que sa mère n'avait pas pu avorter durant la période légale, à cause de la malformation du foetus.

Listed on BlogShares

"Homophobie" ou comment manipuler les médias

Les défenseurs des droits des homosexuels bénéficient d'une forte couverture en France et en Belgique, et doit-on le dire, d'une certaine sympathie. Aux Pays-Bas, autrefois eden de l'homosexualité, c'est plutôt le climat contraire qui règne aujourd'hui.

Mais l'homosexualité n'aurait rien à faire dans un blog consacré aux droits de l'homme et à la bioéthique, si ce n'est sous deux angles: combattre les persécutions violentes contre des personnes qui ont une vie privée questionnable, et les incidences de ce que certains appellent la "lutte contre l'homophobie" sur la liberté des autres, et notamment la liberté religieuse.

Je ne vais pas rentrer dans une discussion sur l'homosexualité sur ce blog. Néanmoins, j'ai été désagréablement surpris par la mobilisation médiatique autour de l'"homophobie". Il y a un certain nombre de personnes étrangères, persécutées à cause de leur couleur qui voudraient bien pouvoir bénéficier d'une once de cette attention médiatique!

Néanmoins, l'aspect intéressant de cette croisade auto-proclamée sur l'"homophobie" a quelques conséquences graves pour la liberté de religion. La plupart des religions proclament que l'homosexualité est un péché contre nature - c'est notamment le cas de la religion catholique, de la religion juive, de l'islam... En essayant de promouvoir des dispositions pénales réprimant l"'homophobie", ce que les associations de défense des homosexuels essayent d'obtenir, c'est en fait, d'imposer le silence aux religions ou aux individus qui voudraient affirmer que l'homosexualité est un péché, et en outre une perversion au plan psychologique.

Double atteinte donc: atteinte à la liberté religieuse et atteinte à la liberté scientifique, puisque le psychologue qui s'aventurera à analyser l'homosexualité comme une perversion se fera aussitôt désigner à la vindicte populaire comme "homophobe"! Qui soit dit en passant est devenu une insulte fort à la mode sur la radio France-Inter (qu'on se souvienne du cas Buttiglione).

Mais comment arrive-t-on à restreindre tellement la liberté d'expression? Probablement, en présentant des cas "exemplaires", comme celui de Sébastien Nouchet, un homosexuel qui affirmait avoir été brûlé vif par des... "homophobes".

Selon un article de l'Express il se pourrait bien que l'agression de Nouchet ait été mise en scène par la prétendue victime, qui est connue pour avoir des tendances suicidiaires. Lisez l'article, ici: http://www.lexpress.fr/info/societe/dossier/homos/dossier.asp?ida=433197

Si cette information se vérifiait, alors se vérifierait cette plaie de notre société qui consiste à vouloir légiférer sous le coup de l'émotion et des campagnes orchestrées par des lobbies bien introduits dans les rédactions. Sur France-Inter, si on a bien rendu compte de la remise en liberté du prétendu agresseur (qui malheureusement manque d'alibi), on s'est soigneusement gardé de parler des suspicions sur Nouchet...

Listed on BlogShares

Tuesday, May 24, 2005

Le cas des « bébés médicaments »

Une décision récente par la Chambre des Lords britannique a libéré le dernier obstacle sur la route de la création de ce qu’on appelle vulgairement des « bébés médicaments ».

En l’espèce, cela vise des familles où un des enfants déjà existants présente une déficience de nature génétique, ou une maladie nécessitant une greffe de moëlle osseuse (par exemple une leucémie) et où il n’existe pas de donneur compatible génétiquement.

En Belgique, la VUB (Université laïque flamande) vient d’annoncer la naissance des deux premiers « bébés médicaments ».

Dans ces cas, s’appuyant sur la fécondation in vitro, les médecins ont conçu l’idée de créer des embryons, et ensuite de sélectionner celui qui, génétiquement, serait le plus proche de l’enfant déjà existant, pour l’implanter et poursuivre une grossesse normale. A sa naissance, un prélèvement de moëlle est effectué chez le « bébé médicament » afin de soigner l’enfant malade. Ce sont surtout les familles originaires du bassin méditerranéen qui recourrent à cette technique, car elles présentent davantage de ces types de problèmes.

Deux techniques sont utilisées ici: la fécondation in vitro et le diagnostic pré-implantatoire. Juridiquement, les deux techniques posent peu de problèmes, en général, car elles sont acceptées dans deux circonstances: premièrement infertilité du couple, deuxièmement, forte probabilité d’une maladie génétique survenant dans la descendance. Ici, pourtant, les deux techniques sont détournées de leur but originel afin d’être utilisé non pas pour le bien intrinsèque de l’enfant à naître - ce qui en soi pose déjà des problèmes éthiques - mais bien dans le but d’assister un autre enfant.

La question qui se pose alors est celle de l’analyse en bioéthique de la situation. Nous savons que le premier devoir du médecin est résumé par la formule latine « primum non nocere ». Dans ce cas, nous avons la subordination d’un être à naître, le « bébé-médicament », à son utilité pour un autre, c’est-à-dire, son frère ou sa soeur malade. Car, cet enfant ne pourrait naître et ne serait pas réimplanté si son caractère génétique n’est pas strictement compatible avec l’enfant malade...

Peut-on dire donc que « primum non nocere » est respecté au regard du « bébé-médicament »? Une réponse en deux temps s’impose. 1° Il n’est pas nui, à strictement parler, au « bébé-médicament » en lui donnant la naissance, mais la création de la vie pour le simple but de traiter un autre enfant est discutable. 2° Il est nui, en revanche, à l’enfant dans la mesure où son existence est toute entière ordonnée à sa finalité « thérapeutique » pour l’enfant malade. D’autre part, le prélèvement de moëlle osseuse inflige au « bébé-médicament » une douleur inutile, ou des risques sans aucun bénéfice pour lui-même.

D’un point de vue philosophique, la question devient encore plus délicate: comment concevoir cette subordination de l’individu à son utilité pour un autre? C’est là où Paul Ricoeur, le grand philosophe chrétien et français qui est décédé ce week-end, avait bien pointé le danger pour le « Je » de subordonner le « Tu » à ses intérêts, au lieu d’essayer de favoriser son autonomie.

Dans ce contexte, rien d’étonnant à ce que les premiers « bébés-médicaments » soient nés en Belgique: ce pays, en adoptant une législation autorisant l’euthanasie, a déjà suffisamment témoigné de son mépris pour la protection des êtres les plus vulnérables...

Listed on BlogShares

Wednesday, May 18, 2005

Aldous Huxley revu par Henri Atlan ou le complexe du scientifique fou...

Mardi 12 mai 2005, dans le 7-9 de France-Inter, un biologiste, Henri Atlan, qui est aussi un spécialiste de la Kabbale était interviewé dans Questions directes, par Stéphane Paoli.

J'ai dû étudier certains de ses textes pendant mes propres études en bioéthique, car il orbitait dans les mêmes cercles qu'une de mes "enseignantes", Mme Baum (qui, en parenthèse, manifestait une sympathie incroyable pour toutes les thèses les plus étranges et qui allait jusqu'à justifier le clonage humain reproductif).

The livre que ce biologiste venait présenter parlait de recherches dans le domaine de la biologie prospective, et notamment d'un "utérus artificiel" (ouvrage dont je ne vous recommande pas la lecture) qui permettrait à des embryons et à des foetus humains d'être développés hors des entrailles d'une femme. Il s'agit d'une idée qui apparaît déjà dans un roman d'anticipation d'Aldous Huxley, Le meilleur des mondes. Si cela vous intéresse, vous trouverez sur la version anglaise de ce blog (http://dawnofeurope.blogspot.com ) un lien à ce livre présent en ligne gratuitement. Sinon, suivez ce lien: http://somaweb.org/w/sub/Brave%20New%20World%20fulltext.html

Selon Atlan, deux angles étaient suivis: celui de scientifiques cherchant à perfectionner des incubateurs pour permettre aux grands prématurés de survivre, en dessous de 24 semaines de grossesse (l'absolue limite de viabilité à l'heure actuelle). Le second angle est celui d'étudier comment maintenir des cellules vivantes in vitro, afin de leur permettre de croître et de former un utérus artificiel.

Le grand problème avec la présentation d'Atlan, c'est le point de vue idéologique à partir duquel il parle. Il expliquait à France-Inter qu'il essayait de supprimer la "malédiction" contenue dans la Bible (livre de la Genèse) qui explique que Dieu dit à la femme, quand il expulsa Adam et Eve du jardin d'Eden qu'elle "enfantera dans la douleur".

Outre le problème qui réside avec des scientifiques s'imaginant qu'ils ont des comptes à régler avec Dieu, il est assez étrange de voir un scientifique retourner aux interprétations les plus primitives, à savoir, une lecture trop littérale des textes sacrés. Les anciens, en fait, cherchaient à expliquer les douleurs de l'enfantement en attribuant la raison à une ancienne malédiction. Et cela peut aussi être interprété comme une interprétation poétique de la faillibilité et de la fragilité de l'existence humaine.

M. Atlan, lui, prenait le texte dans son acception première, le sens littéral. Et pourtant, il serait extrêmement étonné qu'on l'assimile aux juifs orthodoxes ou aux musulmans de la secte wahabite.

Je renvois les lecteurs de ce blog à un site intéressant pour une exégèse (catholique) sur le sens du passage de la Genèse cité par Atlan: http://biblescripture.net/First.html . Ce site explique comment le passage renvoit à l'espérance, et non à la malédiction.

Le second problème, c'est que la science n'est pas là pour permettre la résolution de conflits personnels avec Dieu. Elle est là pour aider l'humanité à progresser, non pour agir sur des sentiments personnels.

La question de Stéphane Paoli allait peut-être au fond des sentiments de la radio qui invitait Atlan: "Est-ce que cela signifie la fin du paradis et/ou de l'enfer"? Malgré cette partialité trop évidente à l'encontre de certaines religions (la religion catholique, pour ne pas la nommer), l'absence totale d'objectivité des deux journalistes spécialistes de médecine, je ne peux que confesser que France-Inter est à peu près la seule radio que l'on peut écouter avec une certaine tolérance - peut-être parce que l'on entend rarement des sujets intellectuels être considérés sur d'autres radios...

Le rêve promothéen de maîtrise sa vie du début à la fin passe à côté d'un facteur important: la vulnérabilité intrinsèque de l'être humain, et le fait que tout être humain est vulnérable au destin sous la forme d'un accident.

Le drame des élucubrations de ceux que l'on ne saurait mieux nommer que "scientifiques fous", c'est qu'ils ne voient pas comment en pensant s'émanciper d'un pouvoir transcendant, ils tombent dans les mains d'un pouvoir très temporel.

Donner la vie hors du ventre d'une femme signifie aussi un contrôle plus restreint and une surveillance accrue de votre enfant par d'autres acteurs (comme dans le "meilleur des mondes". Un autre danger, c'est de voir une société de discrimination et de domination sociale émerger, car des techniques aussi dispendieuses seront limitées aux élites et non aux citoyens ordinaires.

Le dernier point concerne l'enfant: quelle sorte d'enfant sera celui né dans ces circonstances? Nous avons d'un côté les éléments de la naissance d'enfants conçus in vitro, et qui semblent vivre normalement et être bien adaptés dans la société. Mais ils se sont développés dans un milieu naturel, dans les entrailles d'une femme qui les aimait. Qu'en sera-t-il d'enfants dans un environnement totalement dépersonnalisé? Atlan semblait vouloir suggérer que les stimulus de l'utérus "naturel" pourraient être reproduits par les parents... Mais nous ne connaissons pas assez les influences de la vie prénatale sur la psyché de l'enfant pour répondre à cette question.

En conclusion, il est toujours intéressant de plonger au-delà des arguments des avancées scientifiques pour découvrir les motivations cachées. Dans le cas d'Atlan, en révélant ses motivations cachées, il était assez honnête pour dire la vérité. Mais peut-être que ses idées promeuvent une malédiction plus grande pour l'humanité que celle dont il désirait la débarrasser...

Pour en savoir plus sur Atlan, vous pouvez aller lire un site sur lequel il parle de la tradition juive appliquée au clonage: http://ghansel.free.fr/clone.html

En second lieu, si vous désirez entendre l'homme Atlan défendre ses vues, vous pouvez cliquer sur ce lien pour écouter une conférence qu'il donnait devant l'Ecole Normale Supérieure, un haut lieu de l'intelligentsia française. Deux avertissements: le fichier fait 22 MB à télécharger et d'autre part, je n'ai pas écouté cette conférence. Néanmoins, je ne partage pas ses visions, vous vous en serez rendus compte en lisant ce post.

Voici le lien:
http://www.diffusion.ens.fr/audio/2003_03_24_atlan.mp3

Listed on BlogShares

Monday, May 09, 2005

Une légère modification à mon post sur les violences policières: interview du Président de la CNDS

Une petite modification à un post précédent: j'avais cité le rapport de la Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité (CNDS). Eh bien, je vous renvois par ce lien à une interview de Pierre Truche, le Président de la CNDS qui confirme lui-même les causes d'incidents entre policiers et citoyens, à savoir le manque de formation, le racisme et le caractère anxiogène des contrôles routiers... tant pour les policiers que pour les citoyens.

Listed on BlogShares

Monday, May 02, 2005

"..Rapportez à Jean ce que vous entendez et voyez : les aveugles voient.." (Mt., 11, 2-21) Ou la position de l'Eglise vis-à-vis des cellules souches

Un post qui est davantage consacré à la bioéthique proprement dite. Ici, nous allons parler de cellules souches, qui, si l'on s'en réfère à des expériences récentes, seraient capables de rendre la vue à des personnes devenues aveugles à la suite d'un accident. Une petite précision: les aveugles de naissance ne peuvent jamais découvrir la vue: en effet, les connections nerveuses qui permettent aux voyants de... voir, doivent se créer dans les tous premiers temps de la vie. Je n'ai pu résister au plaisir de citer l'Evangile de Mathieu dans ce cas-ci...

Néanmoins, il semblerait que des recherches récentes aient réussi à rendre la vision à des patients à partir de "cellules souches". Cfr. ainsi l'article suivant: http://science.howstuffworks.com/news-item94.htm .

Or, au-delà des intéressants développements scientifiques qui sont réalisés ainsi, ce qui me paraît intéressant, ici, c'est d'en profiter pour examiner la position de l'Eglise catholique sur les cellules souches.

Un première distinction qu'il convient d'effectuer, c'est selon que les cellules souches soient totipotentes, c'est-à-dire, qu'elles ont la capacité de se différencier en n'importe quelle cellule du corps... ou qu'elles soient multipotentes (ou pluripotentes). Ces dernières cellules ont une capacité de différenciation limitée. Ainsi, par exemple, les cellules de la moëlle osseuse, ne pourront se développer qu'en des cellules sanguines ou lymphocytaires (globules blancs).

Or les recherches qui rendent la vue aux aveugles se basent sur des cellules souches multipotentes et non totipotentes. Elles ne se basent pas sur des cellules souches extraites d'embryons, mais bien sur des cellules prélevées sur des donneurs vivants ou décédés.

Et l'Eglise n'interdit les recherches sur les cellules souches que lorsque celles-ci proviennent d'embryons, car pour les obtenir, non seulement il faut considérer l'embryon comme un instrument, mais de plus, le prélèvement de cellules détruit définitivement l'embryon - d'un point de vue moral, on ne pourrait se réfugier derrière l'argument que la faculté de se développer reste préservée chez l'embryon. Un autre gros obstacle est, bien entendu, le besoin de cloner des embryons...

Donc, contrairement à ce qu'affirmaient certains médias, l'Eglise n'est pas totalement opposée aux recherches sur les cellules souches: à condition que l'on ne crée pas d'embryon, elles sont tolérables sur les cellules multipotentes.

Listed on BlogShares